Gaie, nasillarde, éraillée, monocorde… Les adjectifs ne manquent pas pour qualifier cet instrument étonnant. Nous conservons tous à l’oreille des voix qui nous charment, nous bouleversent, nous agacent… La voix a ce pouvoir et bien d’autres encore et pour cause : ce n’est qu’une vibration d’air, et pourtant quelle magie ! Il suffit de quelques litres […]
Gaie, nasillarde, éraillée, monocorde… Les adjectifs ne manquent pas pour qualifier cet instrument étonnant.
Nous conservons tous à l’oreille des voix qui nous charment, nous bouleversent, nous agacent… La voix a ce pouvoir et bien d’autres encore et pour cause : ce n’est qu’une vibration d’air, et pourtant quelle magie !
Il suffit de quelques litres échappés des poumons pour chanter de l’Opéra ou pour prononcer nos quinze mille mots quotidiens.
Un deuxième visage
La voix c’est comme une empreinte digitale, aucune ne se ressemble. Elle est aussi expressive que le faciès. Par d’infimes changements, elle peut trahir l’émotion, séduire ou irriter, blesser ou persuader.
Mais notre voix peut également nous intimider car elle nous met à nu‑: il suffit d’être fatigué, surpris, ému, pour que cela s’entende… Et elle participe à la première impression que nous donnons de nous-mêmes en une poignée de secondes lors d’un entretien d’embauche, d’un rendez-vous galant ou d’un examen devant un jury.
La voix : miroir des émotions
C’est donc le miroir de nos émotions intérieures : une baisse de la tonalité, un tremblement ou une extinction, peuvent en dire autant voire même plus qu’une phrase élaborée ou un lapsus.
« Son inflexion suit l’humeur, les neurotransmetteurs intervenant directement sur le larynx, explique Agnès Augé, psychologue et orthophoniste. En cas de grande émotion, celui-ci se resserre, limitant le passage du souffle. C’est ainsi par exemple que nous aurons “la voix brisée par l’émotion ou le chagrin”. La voix ne triche pas. Elle révèle nos mouvements intérieurs, mais aussi la manière dont on se positionne par rapport aux autres.
Une arme de séduction
On entre en contact avec l’autre grâce à sa voix et si l’on cherche à lui plaire, à le convaincre ou à lui faire passer un message, on la modulera en fonction, plus ou moins consciemment.
Lorsque l’on s’exprime, il y a bien sûr le pouvoir des mots mais pour les plus grands spécialistes en la matière, le pouvoir de la voix est plus fort que celui des mots.
Pour captiver un auditoire ou pour séduire, mieux vaut avoir la voix grave puisque selon des chercheurs de l’université d’Aberdeen (Écosse), plus un homme posséderait un timbre grave et chaud, plus il marquerait les femmes de manière durable.
De même qu’une femme en période de pré-ovulation aurait une voix tirant légèrement vers les aigus. Selon une étude parue en 2008 dans Evolution and Human Behavior, ce changement agirait comme signal de fertilité.
À l’heure du tout communication, du règne de la télé, de la et radio et des vidéos sur le Web, la voix, dont le pouvoir avait été peu étudié auparavant, est désormais scrutée de près et valorisée. Dans une époque où il faut clamer haut et fort qui l’on est, ce que l’on ressent, ce que l’on souhaite, difficile sans la voix d’argumenter, de convaincre ou de plaire… À tel point que des professeurs de voix ou autres thérapeutes vocaux fleurissent, proposant d’apprivoiser sa tessiture non plus seulement à ceux dont la voix est un instrument de travail (comédiens, journalistes radio, enseignants) mais à qui le souhaite.
Et dans certains contextes, comme au cours de séances d’hypnose, de sophrologie ou de médiations guidées, la voix peut même avoir un pouvoir de contrôle sur le corps et l’esprit.
Notre voix, qu’on l’accepte comme elle est ou qu’on décide de la travailler, reste le marqueur de notre identité, le miroir de notre âme.
Pour aller plus loin
Mieux vivre avec sa voix, Agnès Augé, Odile Jacob.
Le pouvoir de la voix , éditions Allary, Jean Abitbol, ancien chef de clinique à la faculté de médecine de Paris, chirurgien ORL et phoniatre.
